Musée Jean de La Fontaine

Château-Thierry

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Fables :
Oeil (L’) du maître

Livre IV, Fable XXI
L'OEIL DU MAITRE

Un Cerf, s’étant sauvé dans une étable à Bœufs,

Fut d’abord averti par eux :

Qu’il cherchât un meilleur asile.

Mes frères, leur dit-il, ne me décelez pas :

Je vous enseignerai les pâtis [1] les plus gras ;

Ce service vous peut quelque jour être utile ;

Et vous n’en aurez point regret.

Les Bœufs à toutes fins promirent le secret.

Il se cache en un coin, respire, et prend courage.

Sur le soir on apporte herbe fraîche et fourrage,

Comme l’on faisait tous les jours :

L’on va, l’on vient ; les Valets font cent tours,

L’Intendant même et pas un, d’aventure, [2]

N’aperçut ni corps, ni ramures,

Ni Cerf enfin. L’habitant des forêts

Rend déjà grâce aux Bœufs, attend dans cette étable

Que chacun retournant au travail de Cérès, [3]

Il trouve pour sortir un moment favorable.

L’un des Bœufs ruminant lui dit : Cela va bien ;

Mais quoi l’homme aux cent yeux [4] n’a pas fait sa revue.

Je crains fort pour toi sa venue ;

Jusque-là, pauvre cerf, ne te vante de rien.

Là-dessus le Maître entre et vient faire sa ronde.

Qu’est ceci ? dit-il à son monde.

Je trouve bien peu d’herbe en tous ces râteliers ;

Cette litière est vieille : allez vite aux greniers ;

Je veux voir désormais vos Bêtes mieux soignées.

Que coûte-t-il d’ôter toutes ces Araignées ?

Ne saurait-on ranger ces jougs et ces colliers ?

En regardant à tout, il voit une autre tête

Que celles qu’il voyait d’ordinaire en ce lieu.

Le Cerf est reconnu : chacun prend un épieu ; [5]

Chacun donne un coup à la Bête.

Ses larmes ne sauraient la sauver du trépas.

On l’emporte, on la sale, on en fait maint repas,

Dont maint voisin s’éjouit d’être [6].

Phèdre, sur ce sujet, dit fort élégamment :

Il n’est, pour voir, que l’œil du Maître.

Quant à moi, j’y mettrais encor l’œil de l’Amant.

[1paturages

[2par hasard

[3déesse romaine des moissons ; chacun retourne aux travaux des champs

[4propriétaire des lieux comparé à Argus avec sa tête entourée de cent yeux qui se reposaient à tour de rôle, par groupes de deux à la fois (Ovide : les Métamorphoses (I, 606-633)

[5arme de chasse

[6se réjouit, terme désuet