Les Fables de Jean de La Fontaine
Jupiter et le métayer
Jupiter eut jadis une ferme à donner.
Mercure [[le messager des Dieux]] en fit l'annonce ; et Gens se présentèrent,
Firent des offres, écoutèrent :
Ce ne fut pas sans bien tourner.
L'un alléguait que l'héritage
Etait frayant [[était coûteux, occasionnait des frais]] et rude, et l'autre un autre si. [[ si était un nom commun, dans le sens d'affirmation ou de condition]]
Pendant qu'ils marchandaient ainsi,
Un d'eux le plus hardi, mais non pas le plus sage,
Promit d'en rendre tant, [[d'en obtenir un tel rendement]] pourvu que Jupiter
Le laissât disposer de l'air,
Lui donnât saison à sa guise,
Qu'il eût du chaud, du froid, du beau temps, de la bise,
Enfin du sec et du mouillé,
Aussitôt qu'il aurait bâillé.
Jupiter y consent. Contrat passé ; notre homme
Tranche du roi des airs, [[fait le souverain]] pleut, vente, et fait en somme
Un climat pour lui seul : ses plus proches voisins
Ne s'en sentaient [[ne s'en ressentaient]] non plus que les Américains.
Ce fut leur avantage ; ils eurent bonne année,
Pleine moisson, pleine vinée.
Monsieur le Receveur [[Qui reçoit pour autrui. Les fermiers des terres seigneuriales s'appellent des Receveurs. (Dict. Furetière)]] fut très mal partagé.
L'an suivant, voilà tout changé,
Il ajuste d'une autre sorte
La température des cieux.
Son champ ne s'en trouve pas mieux.
Celui de ses voisins fructifie et rapporte.
Que fait-il ? Il recourt au Monarque des dieux :
Il confesse son imprudence.
Jupiter en usa comme un maître fort doux.
Concluons que la Providence
Sait ce qu'il nous faut mieux que nous .